Panse Bête n°12

 

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Panse Bête n°12

Voici la lettre d'information co-rédigée
par les Défis Ruraux et le GRABHN.
Informations techniques et témoignages sont au menu.

Bonne lecture !

 

Marjolaine Huguet & Joseph Duhamel, conseillers élevages au GRAB HN
Coralie Henke & Bertrand Farrié, animateurs systèmes herbagers aux Défis Ruraux

 
 

Nos éleveurs témoignent

 

♦ David LEGER, Polyculteur et éleveur bio de 22 vaches allaitantes de race Aubrac – Esteville (76) – Pays de Caux – 18 ha de prairies permanentes (témoignage de novembre 2015)
Aubrac« Mon système d’élevage est basé sur l’autonomie et la minimisation des charges. Les vêlages sont groupés en février-mars. Cela a deux avantages : au printemps, la pousse de l’herbe correspond au pic de lactation des vaches, la production laitière est maximum pour assurer une bonne croissance des veaux au démarrage. Ensuite, les veaux sont vendus à l’automne pour avoir un minimum d’animaux en bâtiment et limiter les stocks de fourrages nécessaires. Durant l’hiver, la ration est constituée de paille, de foin et de minéraux. Le but est de satisfaire uniquement les besoins d’entretien des vaches. Souvent elles perdent un peu en état mais reprennent au printemps. Pour valoriser au mieux mes prairies, je fais une mise à l’herbe précoce : c’est le déprimage. Ensuite je conduis le pâturage au fil avant, la clôture est déplacée quotidiennement pour donner aux animaux une herbe de la meilleure qualité possible. Cette conduite rigoureuse m’a permis d’augmenter progressivement les effectifs du troupeau et de valoriser au mieux le potentiel de mes prairies. Lorsqu’il y a moins d’herbe, je complémente avec du foin au râtelier. Sur l’année, je ne distribue donc aucun concentré à mes vaches.»
Résultats économiques. Marge brute : 1200 €/VA (aides PAC comprises)

 

HolsteinBenoît Delahoulière – polyculture-élevage – 50 VL de race Holstein – Rolleville (76) – Pays de Caux – 44 ares/VL au pâturage (témoignage de mars 2016)
« Cette année les vaches sont sorties le 26 février. Dès la mise à l’herbe, j’ai été attentif à l’aspect des bouses. J’ai vu des bouses liquides et foncées, signe d’un excès probable d’azote. J’ai donc diminué en même temps maïs et correcteur azoté dans la ration. Progressivement, je suis passé de 30 kg brut  de maïs à 15 kg dans la ration. Une fois arrivé à ce stade, j’ai estimé que la drèche et l’herbe pâturée était suffisante pour couvrir les apports d’azote et j’ai arrêté complètement le correcteur. Dans le même temps, j’ai augmenté la fibrosité de la ration en mettant plus de paille (de 0.8 à 1 kg par vache). Aujourd’hui les bouses se tiennent mieux et se sont éclaircies même si elles restent un peu molles. Du côté de la production, j’ai perdu 2L/VL mais comme mon correcteur me coûte à peu près l’équivalent de 4L/VL, je suis gagnant ! En plus, cette perte en production a été compensée par un gain d’un point de TB.»

 

 

Mettre à l’herbe très tôt, pour pâturer longtemps de l’herbe de qualité !

Tous les ans, la décision de sortir les vaches à l’herbe est difficile. Pourtant la règle est simple : « Sortir dès que la portance le permet, sans tenir compte de la date et de la hauteur d’herbe !! ». Certains disent souvent « Mais il n’y a pas encore d’herbe à pâturer, ça pousse pas… ». Et bien justement c’est précisément avant que l’herbe ne commence à pousser qu’il faut sortir pour faire le déprimage (ou pâturage précoce).

 

Le tour de déprimage est indispensable pour :

  • créer un décalage de pousse entre les paddocks
  • nettoyer les parcelles des repousses d’hiver, réservoirs de rouille et autre pathogènes
  • faire taller les graminées pour retarder leur date d’épiaison = souplesse d’exploitation
  • donner de la lumière aux légumineuses pour favoriser leur repousse
  • faciliter la transition alimentaires des vaches
  • constituer un "petit plus" dans la ration des animaux

TROUPEAU LAITIER

 

Mesure à l'herbeComment faire ?
Le tour de déprimage est très lent, les vaches restent plusieurs après-midi sur un même paddock où il n’y a pas grand-chose à manger. Le cycle peut durer 1 à 2 mois selon les conditions météo. Pendant cette période, la ration à l’auge est quasiment équivalente à 100 % de la ration d’hiver. Parfois il arrive de mettre en pause le déprimage à cause des conditions climatiques. Les vaches restent en stabulation en régime d’hiver pendant plusieurs jours, voire même plusieurs semaines… avant de reprendre le déprimage dans le paddock où il a été interrompu.


Quand dois-je arrêter le déprimage ?
Le déprimage, c’est le 1er tour de pâturage tournant. Lorsqu’il se termine, il faudra essayer d’être passé dans toutes les parcelles, y compris celles destinées à la fauche. Prévoir de pâturer 50 à 60 ares/VL pendant les 1 à 2 mois de déprimage.
Ensuite je commence le 2e tour de pâturage quand les hauteurs d’herbe en entrée de parcelles sont suffisantes : 12 cm herbomètre (ou 16 cm mètre ruban). En aucun cas on effectue un 2e tour de déprimage, c'est-à-dire un 2e tour avec des hauteurs en entrée de parcelle inférieures à 12 cm herbomètre (ou 16 cm mètre ruban).

 

Ralentir ou accélérer selon la pousse de l’herbe !
Au départ, les VL sortent seulement l’après-midi avec 100 % de la ration d’hiver à l’auge. Elles restent 3, 4 ou 5 jours dans chaque paddock. Pendant qu’elles avancent de paddock en paddock à ce rythme lent, « je surveille mon paddock pilote ».
C’est le premier paddock sur lequel elles sont sorties. Elles y reviendront uniquement quand il y aura 12 cm herbomètre (ou 16 cm mètre ruban) d’herbe en entrée de parcelle. C’est lui qui va m’indiquer quand les vaches peuvent sortir toute la journée, jour et nuit et quand je peux fermer le silo.

 

TROUPEAU ALLAITANT : SORTIR DE LA ROUTINE FULL-GRASS !

 

Bien souvent chez les éleveurs allaitants, le pâturage est simplifié à l’extrême et repose sur la technique du Full-Grass (ou pâturage continu) : les animaux sont lâchés dans une parcelle et y passent la majeure partie de la saison. Eventuellement, au lieu d’une seule parcelle, on peut avoir 2 ou 3 grands parcs sur lesquels les animaux vont passer 3 ou 4 semaines avant de changer. Même si les animaux « tournent » sur plusieurs parcs, cette dernière pratique est bien plus proche du Full-Grass que du pâturage tournant, qui repose sur un temps de présence limité dans chaque parcelle. Bien que le Full-Grass soit plus simple à mettre en place et demande moins d’astreinte, le pâturage tournant est indéniablement plus performant pour augmenter la productivité annuelle de la prairie et assurer sa pérennité au fil des années.


HerbomètreLes repères changent… pas les principes !
Comme pour les vaches laitières, le pâturage tournant en élevage allaitant a pour objectif de coller à la pousse de l’herbe pour proposer en permanence aux animaux une herbe abondante et de qualité. Les principes de base restent donc valables :

  • Un bon déprimage en sortie d’hiver. Les bienfaits du déprimage pour la prairie, exposés plus hauts, sont indépendants des finalités de l’élevage. Petite différence avec les laitiers, les animaux ne rentrent pas la nuit, il faut donc être un peu plus vigilant sur les risques de gelées et compléter dans un premier temps le pâturage avec du foin.
  • Piloter le pâturage à la hauteur d’herbe. Peut-être la plus grosse différence avec les vaches laitières. Alors qu’on va rechercher, en laitier, de l’herbe à très haute valeur idéale pour la production laitière, quitte à faire maigrir les animaux, on recherche au contraire un gain de poids en élevage allaitant. Il est donc important de faire pâturer une herbe avec un peu plus de fibres et donc plus haute. On visera plutôt une entrée dans le paddock à 18 cm herbomètre (ou 25 cm mètre ruban) ou en prairie naturelle : 15 cm herbomètre (20 cm mètre ruban).
  • Des temps de présence assez courts. Effet direct d’une entrée plus haute, les temps de présence seront légèrement plus longs. Jusqu’à 5-6 jours dans chaque paddock pour impacter le moins possible la repousse de l’herbe.


L’allotement, une aubaine pour le pâturage tournant !
En élevage allaitant, la possibilité de faire des lots est un levier supplémentaire pour donner plus de souplesse au pâturage. Cela offre la possibilité d’ajuster le chargement instantané dans les prairies en fonction de la pousse de l’herbe. Par exemple, si on commence à être débordé par l’herbe, il est toujours possible d’intégrer de nouveaux animaux dans le lot pour maîtriser la pousse de l’herbe. Inversement, il est possible de fractionner les lots lors de la période estivale où il peut être intéressant de diminuer le chargement.
D’un point de vue pratique, cela permet également de mettre en place du pâturage tournant dans des ilots lointains en adaptant le nombre d’animaux que l’on y envoie pâturer, chose que l’on ne peut pas faire en élevage laitier.

 

Gérer le parasitisme des bovins à l’herbe

 

vaches

Au printemps, avec la sortie du troupeau à l’herbe, les animaux se trouvent en contact avec des parasites internes présents dans les prairies. Les parasites les plus fréquents sont : les strongles digestifs, les strongles pulmonaires, la grande douve et le paramphistome. Ce contact est inévitable, il n’y a pas de vache sans parasites ! Il faut cependant veiller à ce que les infestations soient maîtrisées pour que l’animal ne souffre pas et que ses performances ne soient pas affectées.

 

LES ANTIPARASITAIRES, CE N’EST PAS TOUJOURS NÉCESSAIRE


Un parasite est un être vivant qui se nourrit aux dépens de son hôte. Bien gérer les parasites ce n’est pas les éliminer, mais rechercher un équilibre entre l’animal, le parasite et le milieu extérieur.

 

4 bonnes raisons de raisonner les traitements :

  1. Ils ont un coût.
  2. Ils peuvent empêcher ou retarder l’acquisition de l’immunité chez l’animal.
  3. Leur utilisation abusive conduit à l’apparition de formes résistantes des parasites.
  4. Certains traitements sont rémanents, on les retrouve dans les bouses et ils causent la disparition des micro-organismes du sol.

Miser sur l’immunité
L'immunité est la capacité de l'organisme à se défendre contre un parasite. Lorsqu’un animal résiste à un type de parasite on dit qu’il est immun.
Pour les strongles digestifs, les animaux sont immuns au bout de 8 mois de temps de contact effectif avec le parasite. Ensuite il est inutile de les traiter, d’où l’intérêt de les aider à acquérir rapidement cette immunité.
Pour les strongles pulmonaires les animaux construisent rapidement une immunité mais elle est fugace. Au bout de quelques mois sans contact avec le parasite, l’animal la perd. Par conséquent, il faut rester vigilant avec les adultes même s’ils ont été en contact depuis plusieurs années.
Enfin, il n’y a pas d’immunité pour la douve et le paramphistome.

 

LIMITER LES INFESTATIONS PAR DE BONNES PRATIQUES DE PÂTURAGE
Les animaux les plus sensibles sont les jeunes en 1ère année de pâturage. Il faut donc être particulièrement vigilant à leur conduite. Attention, pour les élevages allaitants, on parle de la première année de pâturage sans la mère.

 

Halte aux idées reçues !
Surprotéger les animaux en 1ère année de pâture ne fait que retarder le moment où l’immunité pourra commencer à se construire. Il faut donc que les jeunes puissent être en contact avec des parasites dès que possible.
Dans les élevages allaitants, les veaux qui pâturent avec leur mère n’ont pas besoin d’un vermifuge : ni en pâture, ni à l’entrée en bâtiment.

 

Les règles essentielles pour gérer la pression parasitaire au pâturage
Pour les jeunes à l’herbe :

  • Préférer une mise à l’herbe courant avril et faire déprimer les parcelles par des animaux immuns (adultes) avant de sortir les jeunes.
  • Eviter d’avoir des parcelles réservées chaque année aux jeunes. Ces animaux recyclent beaucoup les parasites et risquent de faire monter rapidement le niveau d’infestation d’une parcelle, contrairement à des animaux adultes.
  • Faire tourner les animaux sur 3 ou 4 parcelles minimum : « Il faut casser les cycles des parasites ». En faisant tourner les animaux sur plusieurs parcelles on évite les ré-infestations importantes. Pendant la rotation les larves vieillissent et sont attaquées par la chaleur. Pour les strongles digestifs, faire tourner les animaux sur au moins 3 parcelles avec un temps de retour de 3 à 5 semaines permet de diminuer par 5 à 10 la charge parasitaire.
  • Limiter le chargement : 1 are/mois d’âge ou 25-30 ares/UGB au printemps, puis 50-60 ares/UGB.
  • Rentrer les jeunes tôt (octobre) pour que le niveau d’infestation n’augmente pas trop. C’est en fin de saison que le niveau d’infestation est le plus important.

SURVEILLER POUR MIEUX AGIR
Les traitements ne doivent pas être systématiques. En agriculture biologique comme en conventionnelle, les traitements ne doivent pas être systématiques, afin d'éviter l'apparition de résistances. De plus, en AB tout traitement doit être justifié.. Il existe différentes méthodes pour surveiller les animaux et décider s’il est nécessaire de traiter :

Parasites Comment les détecter ?
Strongles digestifs Coproscopie : dénombrement des œufs dans les bouses. A réaliser avant octobre. A partir de 500 opg (œufs par gramme) l’infestation présente une menace.
Coproculture : pour identifier les types de strongles présents
Dosage du pepsinogène : pour le strongle ostertagia. Nécessite de réaliser une prise de sang. A partir de 2000 mUT il faut traiter.
Strongles pulmonaires Test de Baerman ou Mc Kena : sur bouse très fraîche
Grande Douve Coproscopie : N’est pas un bon indicateur
Sérologie Douve : A partir d’une prise de sang
Paramphistome Coproscopie : dénombrement des œufs dans les bouses

 

OÙ FAIRE LES ANALYSES ET À QUEL PRIX ?

 

Des laboratoires d’analyse en Haute-Normandie :

 

Laboratoire agrovétérinaire départemental de la Seine-Maritime (LAVD 76)

9 avenue du Grand Cours CS 51140 76175 ROUEN Cedex 1

02 35 03 50 00 -

 

Laboratoire Départemental d’Analyses de l’Eure

12, rue du Dr Michel Baudoux 27023 Evreux Cedex

02 32 38 26 70 -

 

 Coût d’une analyse coprologie + pepsinogène + sérologie douve : 35 à 45 € par lot

Coproscopie : 12-15 €. Identification et comptage des œufs de parasites (paramphistome, douves, strongles digestifs, etc.)

Pepsinogène : 12-15 €

Sérologie Douve : 9-15 €


 


Trucs et astuces

Triticale-Pois fourrager versus Épeautre-Féverole

Pour un concentré de production plus riche et surtout beaucoup moins acidogéne que le traditionnel "triticale - pois fourrager", le mélange "épeautre - féverole" est très prometteur.

 

  • Le triticale acidogéne est très bien remplacé par l'épeautre qui contient un amidon plus lentement fermentescible. La valeur de l'épeautre est légèrement inférieure au triticale de 0,15 UFL à cause des glumes et glumelles qui reste autour de la graine, mais le produit est sécurisé.
  • Le pois fourrager contient seulement 20 % de MAT, alors que la féverole à une teneur de 30 % pour une valeur UFL équivalente. De plus, la féverole n'a pas besoin de tuteur pour son développement. On peut donc augmenter la densité de féverole sans risque de verse. Ce qui permet de corriger la perte d'UFL provoqué par l'épeautre.


Semi d'hiver fin octobre - début novembre : semer la féverole à la volée, puis labourer à 15-20 cm pour protéger la graine du gel. Semer l'épeautre au combiné de semi classique, le même jour.

Récolte : moisson courant août. Battage = Réduire la vitesse du batteur + ouvrir le contre batteur + diminuer la ventilation. Stockage = prévoir de broyer et d'inerter le mélange dans un boudin, en cas de différence de maturité entre les 2 graines.


 


Agenda

 

3 mai et 7 juin

Formation "Mieux conduire ses prairies en élevage allaitant pour assurer l’autonomie fourragère et augmenter la production de viande à l’hectare" - Renseignements : Marjolaine

 

23 septembre
Formation "Perfectionner le pâturage des vaches laitières en bio" avec Eric Favre.

Renseignements : Joseph

 

Crédits photos : R. Lemonnier, B. Farrié, F. Durand, photo-libre.fr

 
 


 

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